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ELECTRIC-ROAD : PARLER VRAI, REFLECHIR CONCRET - 05/10/2021

5 tonnes de batteries dans un 40 tonnes longue distance électrique ? Est-ce bien raisonnable ?

Par Marc Diedisheim

5 tonnes de batteries dans un 40 tonnes longue distance électrique ? Est-ce bien raisonnable ?

Dans le cadre d'un partenariat avec l'événement #ELECTRICROAD 2021, nous publions une série de points de vue écrit par l'organisateur Jean-Patrick Teyssaire, Président d’Honneur de l’événement ou l'un de ses partenaires comme pour ce texte qui décline l'un des thèmes qui y seront abordés.

En guise de préambule, rappelons que le rendement d’une traction électrique est deux fois meilleur que celui d’une traction thermique fonctionnant au bioDiesel, ou à tout autre liquide ou gaz, issus du pétrole, de la biomasse, de la synthèse, ou de toute autre source. 
C’est un atout majeur dans la perspective des économies massives d’énergie que nous allons devoir réaliser dans le transport routier de marchandises. Et ceci indépendamment de la réduction impérative des émissions de CO2. Partons donc de l’axiome que la propulsion électrique a un très bel avenir devant elle dans le transport routier !

1.200 kWh, soit environ 4 à 5 tonnes de batteries, c’est l’ordre de grandeur de ce qu’il faut embarquer dans un semi-remorque de 40 tonnes pour parcourir 700 kilomètres. C’est autant de capacité d’emport commerciale en moins (en masse). Pour “refaire le plein” de 10% à 80% sans perdre de temps utile, 40 minutes sont un maximum, correspondant à un temps de pause réglementaire. Cela nécessiterait de disposer, au bon endroit et au bon moment, d’un point de recharge de plus de 1.500 kW.
Une pareille masse de batteries est-elle réaliste alors qu’on s’efforce par ailleurs d’être économes de nos ressources naturelles non renouvelables, et dont certaines sont rares ? Peut-on accepter une pareille réduction de l’emport, et donc renchérir le coût du transport ? Est-il nécessaire de couvrir les grands itinéraires routiers et autoroutiers de centaines de points de recharge hyper-puissants et leur emprise foncière associée ?

Il y a longtemps qu'on a songé à alimenter les trains en énergie pendant qu'ils roulent plutôt que de les immobiliser dans un dépôt pour faire le plein de charbon ou de fuel. Dans la même logique, pourquoi ne pas brancher les véhicules sur une alimentation pendant qu’ils roulent ?
 
400 kWh, soit seulement environ 1,3 à 1,7 tonne de batteries, c’est ce qui est possible avec la “route électrique”, lorsqu’elle est équipée d’un système de transfert d’énergie “en roulant”. La capacité d’emport en masse n’est que très peu altérée. Le nombre d' arrêts pour recharge à un point fixe est considérablement réduit. Les émissions de CO2 sont réduites dans les mêmes proportions qu’avec 5 tonnes de batteries, et même mieux si on considère celles qui sont évitées lors de la construction de batteries qui sont plus petites.
La route électrique fournira en même temps l’énergie servant à la propulsion, et l’énergie nécessaire à la recharge de la batterie. Ainsi chaque camion sera assuré d’avoir une batterie pleine au sortir de la route électrique, dans tous les cas, après y avoir roulé pendant 2 heures.

Pourquoi 400 kWh ? On considère un réseau de routes électriques suffisamment maillé pour que l’essentiel de notre pays se situe à moins de 125 km de ce réseau. Alors, avec 400 kWh qui permettent à un camion de 40 tonnes d’effectuer environ 250 km en totale autonomie, l’essentiel du territoire est accessible sans recharge fixe, et sans temps perdu.
Un tel réseau aurait une longueur d’environ 8.850 kilomètres.

Pas seulement pour les longues distances ! La concentration des activités logistiques et de distribution autour de grands axes autoroutiers engendre des missions récurrentes sur des distances journalières moyennes de l’ordre de 200 à 300 km. Ainsi par exemple, une étude approfondie des origines-destinations du trafic de TRM (Transport Routier de Marchandises) le long de l’axe Seine (autoroute A13, projet EWAY Corridor II, 2020) a montré que de substantielles réductions de taille de batteries, de l’ordre de 100 à 200 kWh par camion, sont possibles grâce à la route électrique dans plusieurs cas d’usages importants impliquant une distribution régionale. Cette étude EWAY Corridor II n’a, il est vrai, porté que sur ce seul axe Seine, mais tout porte à penser que les configurations ainsi observées se répètent dans l’ensemble de la France et représentent un nombre de véhicules et un kilométrage importants.

Réduire le coût des véhicules légers  La même étude EWAY Corridor II a montré que plus de la moitié du trafic de véhicules légers sur une portion significative de l’A13 était “régulier”, c’est-à-dire que les véhicules empruntent les mêmes portions tous les jours de la semaine, ou plusieurs fois par semaine. Ainsi, avec un véhicule léger équipé d’une batterie de seulement 30 kWh environ, et pouvant se connecter à la route électrique, l’essentiel des besoins de mobilité récurrente est ainsi couvert par des véhicules au prix abordable ! Halte à la course aux grosses batteries qui ne concerne que les CSP ++ !
Et les longs trajets de vacances avec ces “petites” voitures ? L'autonomie le long de la route électrique est sans limite puisque c’est elle qui fournit l’énergie ! Avec au bout du chemin 30 kWh, jusqu’à 200 km d’autonomie.

Quelles technologies ?
Trois technologies sont en compétition : par contact glissant, ou par induction. Pour le moment l’induction n’a pas encore la puissance nécessaire. Restent le contact glissant, soit par le haut (caténaire-pantographe, comme les trains), soit par le bas avec des rails incorporés dans la chaussée. Le caténaire-pantographe est séduisant, il est éprouvé depuis plus d’un siècle et n’entre pas dans la chaussée. Mais comment faire pour installer un pantographe de 5 mètres sur une Clio ou une 208 ? Exit les véhicules légers ! Alors, avantage aux rails dans le sol ? Mais dans tous les cas, la technologie élue sera synonyme d’économies dans tous les domaines, d’environnement mieux préservé et de liberté de mouvement conservée.

On le voit, plusieurs solutions existent mais rien ne se fera sans une forte volonté politique. Gageons que la France rejoindra rapidement le club des autres pays européens, notamment l’Allemagne et la Suède, dans la dynamique de mise en oeuvre de la ROUTE ÉLECTRIQUE au bénéfice de la collectivité et du transport.

Marc Diedisheim, responsable des études techniques à L'Observatoire de l'Innovation dans l'Energie


A ne pas rater lors du congrès Electric Road du 18 au 20 octobre au Parc des Expositions de Bordeaux du 18 au 20 octobre prochain. www.electric-road.com :

Le mercredi 20 octobre 
14h00-15h30 PLÉNIÈRE 10 : Y-a-t-il des alternatives écologiques viables dans le transport lourd de marchandises longue distance ?
15H30 -16h30 ATELIER 12 : EWAY-CORRIDOR : première étude approfondie de route électrique sur l'axe le havre Paris pour le Transport Routier de Marchandises .... et plus

Le congrès Electric Road, qui se déroule chaque année depuis six ans, a pour ambition de réunir les meilleurs industriels et les meilleurs experts pour réfléchir et proposer des outils de décision sur l’ensemble des enjeux et des défis que représente la formidable mutation que nous imposent les dangers climatiques.

Inscriptions sur le site ElectricRoad 

Réactions

Tiens revoilà le trolley,et quand c’est pas électrifiable l’hydrogéne en hybride ?

Comme déjà exprimé ici, cette solution du camion longue distance à batterie n'est pas faisable car la donnée principale d'un camion est sa charge utile pour les transporteurs qui globalement gagnent leur vie en fonction de la masse qu'il transportent. Nous entrons aussi ici dans le cercle vicieux du camion sur lequel on mets plus de batteries pour transporter plus loin mais moins ! Pour analyser la viabilité d'une solution, il faut pousser le raisonnement à l'infini, ce qui donne que nous aurions des camions électriques avec une autonomie incroyable mais qui ne transportent que leurs propres batteries ! Ce n'est pas jouable aujourd'hui tant que le stockage énergétique prend une telle masse.
Quand aux caténaires, autant mettre les semis directement sur les trains sur les grands axes, ça économisera au moins le transport des 8 -9 tonnes de chaque tracteur qui ne seront que pour l'approche locale avant et après. On avait appelé cela le ferroutage...
;0)

J’aime bien le message des transporteurs ….j’aurais bien pris le train mais …yen a pas)))

Et oui fiasco total. Faut donner cela au privé.
;0)

@Lucos: l'immense majorité des camions sont limités en volume, pas en poids.

C'est aussi une donnée importante mais il n'y a pas que de la messagerie, n'oublions pas les pulvérulents, les céréaliers, les toupies à béton, les porte-char, les transports exceptionnels...
;0)

A mettre en perspective tout de même au 1000 l de gazole soit une tonne qu'emporte chaque semi, ce qui signifie 30 tonnes de gazole pour un semi pour 100000 km...
Le trolley sur la file de droite me semble une bonne solution de transition en attendant des batteries avec une densité bien supérieure.

"Décorer" 9000 km de routes en caténaires alors que localement on veut enterrer les lignes électriques existantes, alors qu'on reproche aux éoliennes leur impact sur le paysage, c'est - comment dire - osé ! A 6 mois de la présidentielle, je ne tenterais pas...
Rails dans le sol ? Je crois comprendre que la mise au point de cette techno sur les tramways n'a pas été simple, alors qu'on parle ici que d'1 ligne de qq kilomètres et d'1 seul type de matériel roulant. Réussir la compatibilité entre 9000 km de route (voire plus à l'échelle européenne) et une centaine de type de véhicule...? sacré challenge. Et il ne faudra pas oublier le système de facturation, le contrat de maintenance de l'infrastructure, l'expert chargé de départager la cause du dysfonctionnement (si ma voiture ne recharge pas sur la N12, c'est à cause du constructeur ? du gestionnaire de l'infra ? du fournisseur d'électricité sur cette zone ?...). Tout cela me semble bien compliqué.

Et puis finissons déjà d'électrifier les 19 000 km de voies ferrées.
Le ferroutage fonctionne parfaitement dans le tunnel sous la manche, pourquoi cela ne serait-il pas possible ailleurs ?
;0)

Je préconise le système des auto-tamponneuses : un grillage électrifié au-dessus de la tronche et une perche qui va chercher le jus = liberté totale de dépassement.
Et puis on peut mettre une queue de Mickey sur la perche, c'est joli.

@Arnaud C
en poids aussi, c'est 44 tonnes max

@Bruno Haas : très bonne idée le grillage auto-tamponneuse ! En plus, en hiver, suffira de pousser un peu les watts pour dégeler la route. Le problème de la N118 est résolu !

Ouf… heureusement qu’il y ici des gens de bon sens…et qui ont la notion des réalités de «l’existant » et ne font pas l’erreur de l’auteur de l’article (nothing personal d’ailleurs et que je ne connais pas) qui fait à la moitié de la science fiction, et pourquoi ne dresse-t-il pas d’abord un état de la situation actuelle des infrastructures et des investissements déjà fait sur celles-ci, sinon pour faire la grosse erreur de tout technocrate hors sol, à savoir, faire de « l’empilement » des technologies les unes sur les autres ! Évidemment on jette tout le reste !!
Je peux aller à Marseille en tout confort et en moins de quatre heures… et pourquoi cette belle technologie n’a pas été adoptée depuis longtemps par les suédois, alors que selon l’auteur ils sont des cadors dans le caténaire et autres facéties électriques lourdes et donc à suivre selon lui !
Nous attendons une réponse de sa part !
Que le spécialiste ce matin sorte de son domaine pour s’interroger pourquoi les politiques s’empressent en quatre ou cinq ans de défaire ce ce qu’on fait leurs adversaires politiques précédents !
Tiens il manque un aéroport à Nantes ! Vite empressons nous d’un faire un en moins de quatre ans !!
C’est bête c’est hors sujet… dommage !!
Une chose est sur, l’électrification des carrosses sur pneus est là pour durer et les prises électriques individuelles sont loin de disparaître dans le monde !!
C’est sur, réformer ou améliorer l’existant, auquel le monde a tant investi de milliards, ce n’est pas glamour du tout !!
Je comprend ceux qui s’énervent !!
Écolos compris !!

@ Bruno Haas, Le 05/10/2021 à 10:33
L'avantage des auto-tamponneuses, c'est qu'il n'y a pas besoin de permis.
Et qui veut aller loin, manège sa monture...
;-)

Je découvre avec stupeur que Mickey a une queue, on ne m'a rien dit !
;0)

@Y A A, à 11:49
Excellente suggestion d'amélioration opportune !

@Clerion, à 13:10
Et aussi celle de Pierre Dac : qui aime ses lunettes ménage sa monture

Chez Poutine ils adorent les surtensions, car sur certaines lignes en Sibérie, ils dégèlent les caténaires avec de grosses surtensions sinon court circuits !! C’est vrai ils aiment le risque comme à Tchernobyl…

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