01/09/2025 - #Suzuki
Crédits auto : victoire partielle des banques dans une affaire de plusieurs milliards à Londres
Par AFP
(AFP) - La Cour suprême britannique a donné le 1er août une victoire partielle aux banques dans une affaire de ventes abusives sur certains crédits auto, qui faisait planer le risque d'une vague d'indemnisations de plusieurs milliards de livres sur les établissements de crédit britanniques.
La plus haute juridiction examinait trois dossiers, dans lesquels des acheteurs de voitures à crédit ont payé sans s'en rendre compte, en plus du prix du véhicule et du prêt, une commission rétrocédée par la banque au concessionnaire, considéré comme courtier dans l'opération.
La Cour suprême a globalement estimé que les réclamations des clients contre les banques "sont irrecevables", contrecarrant la décision de la Cour d'appel. Elle note cependant que l'un des trois plaignants était bel et bien fondé à demander compensation mais pour d'autres motifs que ceux retenus précédemment.
En cause notamment dans cette affaire : les banques autorisaient les vendeurs automobiles à ajuster le taux d'intérêt proposé aux clients. Plus il était élevé, plus la commission était importante, une pratique depuis interdite.
Mais personne "ne pouvait raisonnablement penser" que les concessionnaires automobiles "faisaient autre chose que considérer leurs propres intérêts", a tranché Robert John Reed, le président de la Cour suprême, lors de l'énoncé du jugement.
Relation "injuste"
La Cour suprême a cependant pris partie pour Marcus Johnson, l'un des trois plaignants, qui avait acheté à crédit, en juillet 2017, une Suzuki Swift à un concessionnaire de Cardiff, au Pays de Galles, pour un total de 6.500 livres (près de 7.500 euros), sans se rendre compte que la somme comprenait une commission de plus de 1.600 livres.
"Le fait que la commission non divulguée soit si élevée est une indication forte que la relation entre M. Johnson et la société financière était injuste", a estimé le juge, intimant au groupe sud-africain FirstRand Bank, en cause dans ce cas particulier, le remboursement de la commission avec intérêts.
Après trois jours d'audience en avril, la décision de la Cour suprême était attendue avec anxiété par les banques britanniques. Si elle avait donné raison aux emprunteurs, la décision se serait imposée aux dossiers comparables, qui sont légion dans le pays.
Des millions de conducteurs étaient potentiellement concernés, pour peu qu'ils aient acheté, entre 2007 et 2021, une voiture avec un crédit assorti d'une "commission discrétionnaire".
"C'est un résultat décevant pour nos clients et je pense pour beaucoup de consommateurs", a réagi auprès de l'AFP Kavon Hussain, avocat des deux plaignants ayant essuyé une décision négative.
"Ce n'est pas la grande victoire que les consommateurs espéraient, mais c'est tout de même une victoire considérable", a nuancé Sam Ward, un enquêteur privé qui a travaillé sur de nombreux dossiers similaires.
"Les banques devront encore verser d'importantes indemnisations, mais ce n'est pas le choc" que certains avaient envisagé, ajoute-t-il auprès de l'AFP.
Le gendarme britannique des marchés financiers (la FCA) a annoncé deux jours après le jugement le lancement d'une consultation "sur un programme d'indemnisation sectoriel", qui dépassera probablement "les 9 milliards de livres".
"Dans de nombreux cas, les paiements de commissions étaient légaux", a résumé l'autorité. Mais "la Cour a jugé que, dans certaines circonstances, le défaut de divulguer correctement les accords de commissions pouvait être injuste et donc illégal", ajoute-t-elle.
La plupart des plaignants "recevront probablement moins de 950 livres en compensation", avec de premiers versements espérés en 2026.
Provisions
Les banques les plus exposées ont ces derniers mois mis de côté des sommes considérables en prévision de leur exposition - au premier rang desquelles Lloyds, groupe qui dispose du plus grand réseau d'agences bancaires dans le pays, avec presque 1,2 milliard de livres de provisions.
Face à l'ampleur de cette affaire, qui faisait peser un risque sur les banques et donc sur l'économie britannique, la ministre des Finances Rachel Reeves avait demandé à la Cour suprême la possibilité de s'exprimer dans le dossier --une requête qui lui a été refusée.
"Nous allons maintenant travailler avec les régulateurs et le secteur pour comprendre l'impact pour les entreprises et les consommateurs" de ce jugement, a réagi le Trésor dans un communiqué.